A Cuba, la police interrompt une grève de la faim de dissidents

  • 2020-11-29 15:39:51
Un collectif d’artistes et d’intellectuels entendait protester contre la condamnation d’un rappeur, Denis Solis. Il a suffi aux forces de l’ordre cubaines d’un prétexte sanitaire pour mettre brutalement fin à dix jours de contestations inédites au cœur même de La Vieille Havane. Arguant d’une « violation du protocole de santé pour les voyageurs internationaux », en référence à l’arrivée sur les lieux du journaliste et écrivain cubain Carlos Manuel Alvarez, collaborateur au Washington Post et au New York Times, plusieurs dizaines de policiers ont évacué, dans la nuit du jeudi 26 novembre, le local du Mouvement San Isidro (MSI), un collectif d’artistes et d’intellectuels dissidents. Six personnes y avaient entamé une grève de la faim pour protester contre l’incarcération du rappeur Denis Solis en début du mois. L’intervention, violente et spectaculaire de par les moyens engagés, selon les premiers témoignages, a été précédée par une coupure générale des réseaux Facebook, Twitter et Instagram sur toute l’île. C’est par eux que communiquaient les grévistes et huit autres militants, retranchés ensemble depuis le 10 novembre dans cette maison appartenant à l’artiste et figure de proue du mouvement Luis Manuel Otero Alcantara. Juste avant l’intervention policière, trois médecins ont frappé à la porte pour vérifier, selon eux, la validité du test du Covid-19 de Carlos Manuel Alvarez. Tard dans la nuit, la majorité des personnes interpellées ont fait savoir sur les réseaux sociaux, à nouveau fonctionnels, qu’elles avaient été relâchées. Peu connu jusque-là du grand public, le MSI, créé en 2018 contre la censure artistique, a largement gagné ces derniers jours en notoriété, au-delà même des frontières, avec cette mobilisation abondamment relayée en ligne. Au point que, pour de nombreux observateurs, celle-ci figure comme l’action de désobéissance civile la plus importante depuis mai 2019, lorsque des activistes avaient défié le pouvoir en organisant une Gay Pride, malgré son interdiction, au cœur de la capitale cubaine. La marche s’était soldée par l’arrestation sans ménagement de trois militants, à quelques mètres du Malecon, la célèbre avenue du bord de mer.

متعلقات