Human Rights Watch dénonce une « persécution politique » contre Evo Morales en Bolivie

  • 2020-09-11 18:21:45
L’organisation estime que les accusations de « terrorisme » contre l’ex-président et d’anciens membres de son gouvernement sont infondées et « motivées par des intérêts politiques ». Depuis son arrivée au pouvoir en novembre 2019, la présidente autoproclamée de Bolivie par intérim, Jeanine Añez, semble déterminée à écarter définitivement Evo Morales de la vie politique du pays. « Sédition », « terrorisme », « financement du terrorisme » et même « génocide »… Les accusations contre l’ex-président se sont multipliées au cours de ces derniers mois. Des dizaines de plaintes ont par ailleurs été déposées contre d’anciens fonctionnaires de l’administration Morales ou des sympathisants de son parti, le Mouvement vers le socialisme (MAS), pour corruption, terrorisme, ou encore appartenance à une organisation criminelle. Depuis son exil en Argentine, Evo Morales dénonce une persécution politique. Il n’est pas le seul. L’organisation Human Rights Watch (HRW) publie ce vendredi 11 septembre un rapport intitulé « La justice comme une arme : persécution politique en Bolivie », dans lequel elle assure que la plupart de ces accusations « paraissent motivées par des intérêts politiques ». Le gouvernement de Mme Añez « a imposé des pressions publiques contre des procureurs et des juges pour qu’ils agissent selon ses intérêts », dénonce le texte. Son auteur, César Munoz, chercheur auprès de la division Amériques de HRW, pointe des « preuves d’accusations infondées, des violations du processus pénal, des restrictions de la liberté d’expression et l’usage excessif et arbitraire de la détention préventive ». « La chasse » aux « séditieux » Dans son rapport, HRW commence par rappeler que « l’ingérence politique dans le système judiciaire est un problème qui existe depuis longtemps en Bolivie » et qui a été utilisée par Evo Morales lui-même à de nombreuses reprises : « Pendant ses presque quatorze ans au pouvoir, le parquet a présenté des accusations contre plusieurs de ses rivaux politiques dans des affaires qui paraissaient motivées par des raisons politiques. » Son gouvernement, assène le texte, « a fragilisé l’indépendance du système judiciaire en créant une situation qui a permis au gouvernement d’alors, et à celui d’Añez maintenant, d’utiliser de manière indue le système judiciaire à des fins politiques ». Jeanine Añez, souligne l’ONG, « avait la possibilité de rompre avec le passé et de garantir l’indépendance judiciaire ». Elle ne l’a pas fait, regrette HRW, bien au contraire. Dès le début de son mandat, en novembre 2019, le ministre du gouvernement, Arturo Murillo, appelait à faire « la chasse » aux « séditieux » et demandait au procureur général de réaliser une « purge » au sein du parquet. Une plainte déposée en juillet contre Evo Morales pour terrorisme, souligne le rapport de HRW, se fonde sur un seul appel téléphonique que l’ex-président aurait passé le 14 novembre 2019, quatre jours après sa démission forcée. Il y aurait exhorté un collaborateur à mobiliser les manifestants pour couper les accès aux villes et empêcher l’entrée de denrées alimentaires. Mais « les coupures de routes sont une forme de protestation courante en Bolivie et dans d’autres pays de la région », rappelle l’ONG. « La Bolivie a le droit de considérer qu’empêcher l’arrivée d’articles essentiels dans les villes est un délit et de le punir, mais ce n’est pas une action que l’on puisse qualifier de terrorisme », considère le rapport, qui estime que l’accusation contre l’ex-président ressemble « plutôt à une attaque politique contre Morales et ses partisans », alors que les élections présidentielles et générales doivent se tenir le 18 octobre.

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